A l’origine du cocktail, le coquetel,

Suivi d'une recette du Sazerac, le plus vieux des cocktails

Gastronomie

09DÉC. 2020

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A l’origine du cocktail, le coquetel

Suivi d'une recette du Sazerac, le plus vieux des cocktails

09 DéCEMBRE . 2020

Écrit par Morgan Malka

Photographies par Esther Ghezzo (image à la une)

Vous siroterez bien un cocktail pendant les fêtes ? Si les noms qui leurs sont donnés sont souvent exotiques ou reflètent d’un mode de vie urbain typiquement anglo-saxon, l'histoire du cocktail pourrait pourtant débuter à … Bordeaux au XVIIIe siècle. Explications (et recette du Sazerac) pour que vous puissiez briller en famille.

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Le Sazerac, l’un des premiers cocktails du monde !

Cocktail, coquetier : aux origines du mot

L’étymologie du mot cocktail est encore largement discutée, si la plus vraisemblable est celle associée à la queue du coq (cock-tail) aux multiples couleurs et aux teintes variées, gages d’infinies mixologies, d’autres théories sont avancées.

Les comptoirs ne sont-ils pas radeaux de légendes ? Le mot cocktail pourrait venir du Français coquetier, c’est en tout cas ce qu’on avance chez Antoine’s, véritable institution néo-orléanaise en matière d’héritage culturel français.

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© Quaff

Les Anglo-saxons auraient traduit coquetier par coquetiel, cocktail. Ce n’est pas sans rappeler une pratique associée à un apothicaire Français installé en ville, Antoine Amédée Peychaud qui mesurait les doses d’alcool à but médicinal dans des coquetiers.

Antoine Amédée Peychaud, un Bordelais préparateur de cocktails avant l’heure

Antoine Amédée Peychaud, originaire de Bordeaux, est l’un de ces Français qui fut séduit par la Nouvelle-France. Amédée se serait dans un premier temps installé à Saint-Domingue qui deviendra plus tard Haïti grâce à la révolution menée par Toussaint Louverture en 1791.

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Le bitter Peychaud, DR

Ce serait en 1795 qu’il gagnerait le 437 rue Royale à la Nouvelle-Orléans où il fondera sa pharmacie (aujourd’hui une boutique d’antiquaire). Franc-maçon, il aurait rapidement gagné en popularité en ville comme pharmacien, apothicaire et surtout préparateur d’un amer aromatique issu d’une recette familiale. Eh oui, vous l’avez reconnu : c’est le bitter !

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DR

Il aurait, pour mesurer ses quantités, utilisé un coquetier. Cependant un mot issu du Bordelais d’avant la Révolution laisse à penser qu’il existe une autre théorie : coquetel aurait définit un mélange d’alcools, mot de chai aujourd’hui oublié mais qui fut sans doute traduit par les Français du Nouveau-Monde. C’est en tout cas l’une des six étymologies du mot cocktail acceptée. Ceci étant dit, la première trace du mot orthographié cocktail n’apparaît qu’en 1803.

Le Sazerac, premier cocktail de l’histoire ?

Le bitter créé par Antoine Amédée Peychaud prendra son nom et est encore aujourd’hui commercialisé sous sa formule d’origine, il est l’un des deux ingrédients-phare du plus célèbre cocktail de New Orleans, qui est aussi l’un des tout premiers : le Sazerac.

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La légende raconte que Sazerac de Forge et Fils (qui deviendra plus tardivement de Forge et Kotniski) séduisit les habitants de Louisiane en vendant l’autre ingrédient de base de ce cocktail, le cognac.

En 1850 Sewell T. Taylor revends son bar The Merchants Exchange Coffee House pour devenir importateur de cognacs français. C’est Aaron Bird qui reprend l’affaire et renomme tout simplement l’endroit Sazerac Coffee House. Le lieu est aujourd’hui le musée officiel du Sazerac.

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« Ladies Night » au Sazerac Bar, au Roosevelt Hotel à New Orelans, dans les années 50.

Bird aurait eu l’idée d’associer le cognac Sazerac français au bitter déjà populaire de Peychaud. Le cocktail Sazerac était né, un mélange de bitter, de cognac, de sucre et de zeste d’agrume servi dans un verre rincé d’absinthe.

Le café change de main jusqu’en 1870 où son nouveau propriétaire Thomas Handy remplace le cognac par du whisky de seigle en raison de l’épidémie de phylloxéra qui ravage le vignoble français. Depuis, le Sazerac est presque invariablement préparé avec du whisky de seigle ou rye whisky.

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DR

La Sazerac company implantée aux États-Unis va même racheter la Distillerie du Kentucky pour produire son propre whisky et le commercialiser sous le nom de Sazerac, ajoutant ainsi à la confusion. Une autre version du Sazerac est commercialisée plus récemment par la même entreprise -considérée comme frauduleuse puisque étant un mélange de Brandy et de Bourbon.

L’autre ingrédient essentiel à la préparation du Sazerac ? L’absinthe, qui après un long interdit entre 1912 et 2007 sera elle aussi remplacée à partir de 1934 par de l’Herbsaint préparé localement, du Pastis ou encore du Pernod.

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Hélas cette légende est discutable, d’abord parce que les cocktails sont présents dès le XVIIe siècle -notamment le punch- ensuite parce qu’une série de cocktails apparaît dès 1810 alors que le nom de Sazerac n’apparaît pas avant 1899, le reste étant colportage de légendes.

Quant à la responsabilité d’Amédée Peychaud ou celle d’Aaron Bird, c’est totalement faux. On sait aujourd’hui que Billy Wilkinson et Vincent Miret, célèbres créateurs de cocktails de leur temps sont à l’origine du Sazerac.

Enfin concernant le cognac, celui-ci était déjà largement passé de mode au moment de la création du cocktail. Le whisky semble être par contre présent dès sa création, Vincent Miret étant célèbre pour ses préparations à base de whisky.

 

La vraie recette du cocktail Sazerac

Pour préparer un Sazerac primitif et débarrassé des outrages du temps, on rince un verre avec un trait d’absinthe. On ajoute trois ou quatre traits de Peychaud puis une dose de cognac. Un peu de sucre roux, de la glace (ou pas) et un zeste d’orange ou de citron.

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Inutile de préciser que le Sazerac se déguste avec un bon cigare pour les amateurs et un excellent disque de Kid Ory, Louis Armstrong ou Doctor John. Pendant les fêtes, à vos coquetels !

M.M

 

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