La traversée de l’Atlantique,

Un rêve accessible aussi aux amateurs

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17DÉC. 2021

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La traversée de l’Atlantique

Un rêve accessible aussi aux amateurs

17 DéCEMBRE . 2021

Écrit par Patricia Colmant

Photographies par Patricia Colmant

La traversée de l’Atlantique, le rêve d’une vie ou un mode de vie. Près d’un millier de marins venus de tous les horizons étaient rassemblés sur les pontons de Las Palmas, Grande Canarie, fin novembre, pour connaître la joie de naviguer plusieurs semaines loin de toutes terres habitées. Portraits croisés de futurs marins au long cours.

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Las Palmas de Gran Canaria, le point de départ de la traversée de l’Atlantique, pour marins aguerris comme amateurs aventuriers !

Monocoques de plus de 8 m, catamarans, trimarans, près de 150 voiliers avaient répondu le mois dernier, à l’invitation annuelle du World Cruising Club pour mettre les voiles vers Saint-Lucie dans le cadre de l’ARC ( Atlantic Rally for Cruisers).  Une navigation de plaisance au fil des alizés au départ de Las Palmas, plutôt réputée havre hivernal de retraités européens qu’escale de « bouffeurs d’écoutes »…

Équipages hétéroclites de copains en mal de grand air, de familles désireuses de couper les amarres d’une vie rangée, skippers professionnels qui font du charter ou jeunes retraités plein de dynamisme, beaucoup d’entre eux traversent l’Atlantique pour la première fois.

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Certains ont rêvé cette aventure des années, d’autres sauté le pas en quelques mois car le Covid les a mis au chômage dans de bonnes conditions financières.

 

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Des skippers ont déjà cinq ou six transats au compteur quand d’autres ne voulaient pas prendre le risque de traverser seuls, sans encadrement. Tous partent heureux d’avoir franchi les obstacles professionnels, psychologiques, financiers mais aussi sociaux car ce n’est pas si facile de quitter ses amis, ceux des enfants, mettre entre parenthèses sa situation professionnelle ou tout faire pour que la retraite s’ouvre sur une vie active.

 

Changer de vie, au moins un temps

En arpentant les pontons de Muelle Deportivo, avant le grand départ, nous avons croisé de beaux espoirs d’une nouvelle vie, au moins temporaire.

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Michèle et Karl Backer avec Maya sur Amelia © Patricia Colmant | Nikon Z50

En cherchant d’où proviennent de vifs aboiements, nous avisons Maya, chienne multi-race un peu énervée, sur le pont d’un catamaran. « Elle est du voyage ? » lance-t-on à un grand costaud entrain de briquer. « Oui, avec Ellie notre autre chien, répond l’Américain. J’étais pilote chez Emirates Airlines depuis 8 ans et ils m’ont viré en 2020 à cause du COVID ! ». L‘homme est tout sourire, comme si, à 52 ans, la compagnie aérienne de Dubaï lui avait rendu un fier service. « Avec l’indemnité on a acheté ce bateau. J’avais un peu navigué quand j’habitais en Californie. On s’est dit avec Michèle ma femme que c’était l’occasion de changer de vie. On a aussi trois perroquets à bord parce que Michèle s’occupait d’un refuge d’oiseaux la-bas. On ne pouvait pas les abandonner ». Et pour ne pas traverser seuls, ils ont proposé à leur gouvernante philippine, Roda, de les rejoindre… « Elle est retournée aux Philippines passer tous les examens maritimes, et nous a rejoint. On va rester un peu aux Caraïbes. Après, on verra » conclut Karl Backer, impatient de larguer les amarres.

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Une dernière lessive avant le départ… © Patricia Colmant | Nikon Z50

 

A 13 ans en haut des 26 mètres de mât

Un sentiment partagé par Simon et Amandine Pollard, la petite quarantaine, qui s’affairent autour d’une montagne de cartons de vivres livrés à bord quelques heures plus tôt. A 20 ans, la jeune française, alors étudiante, était partie en Nouvelle-Zélande. Sa route a croisé celle de Simon, ingénieur et amateur de voile. Ils ont navigué régulièrement puis la famille s’est agrandie au point qu’aujourd’hui, à bord de Dragonfly, un monocoque de 17,50 m, il y a aussi Tama, 13 ans, Luca 12 ans, Naomi 10 ans et Lee 4 ans. Quand nous les abordons, Simon hisse son fils de 13 ans en haut des 26 m de mât, car la girouette est débranchée ! « On leur a appris à être autonomes » explique calmement Amandine, peu inquiète de voir son aîné devenu un petit point tout la haut. « Il a déjà commencé à faire des quarts de nuit, seul, poursuit la mère. On dormait près de lui, mais il était aux commandes ».

Ce grand départ, la famille y pensait mais ils avaient une vie heureuse à Tauranga ( île nord de la Nouvelle-Zélande). Belle maison, belle situation, plein d’amis, jusqu’au jour où le COVID s’est déclaré.

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Tama, perché en haut du mat à treize ans ! © Patricia Colmant | Nikon Z50

 

« Tout le monde a commencé à déprimer. On était enfermés, plus d’école, plus de vie. Ça nous a décidés. On a vendu la maison, quitté nos boulots et acheté ce bateau pour faire le tour du monde avec nos enfants. »

 

«On a eu de gros soucis techniques avec le mât qui nous ont coûté cher, mais on est tellement heureux d’avoir pris cette décision, poursuit la jeune Aixoise. Pour les familles, faire l’ARC c’est formidable car les enfants se font des amis sur les pontons qu’ils retrouveront à Sainte-Lucie. L’organisation les occupe ce qui nous permet de travailler sur le bateau tranquillement » nous confient les marins en herbe…

 

Trois fringants retraités et un scientifique de haute volée

On quitte Dragonfly en se réjouissant pour ces enfants qui vont vivre une aventure exceptionnelle quand on avise quatre messieurs entrain de rire dans le carré d’un joli catamaran. « On peut vous déranger ? ». Réponse : « vous préférez le gaspacho ou le vin blanc ?» Et nous voilà en compagnie de trois fringants retraités : Marc Maupas, entrepreneur nantais qui a commandé à son copain Charlie Capelle, patron du chantier Technologie Marine de La Trinité-sur-mer ce catamaran et Jean-Yves Derrien. Ce chimiste est en train de faire sauter des gambas pour l’apéritif.

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Les « sexygénéraires » de Diversion comptent régater avec les meilleurs © Patricia Colmant | Nikon Z50

« On est une équipe de sexygénaires ! » Qualificatif trouvé par Marc trop heureux de partir naviguer entre copains. Tous sont navigants aguerris, mais cette traversée de l’Atlantique dans le cadre de l’ARC « nous a obligé à mieux préparer la traversée » reconnait le propriétaire. Et avec leur catamaran Diversion ils ont bien l’intention de « se tirer la bourre » avec la quinzaine d’autres bateaux performants inscrits dans leur catégorie.

Un esprit régatier qui n’anime guère Piero Zucchelli à bord d’Andrew. Il s’est offert ce monocoque de 17,20 m après avoir vendu Andrew, un robot inventé en 2010 pour les expériences en laboratoire, y compris les travaux sur le COVID-19. Ph.D. en physique à Standford (Californie), chercheur au CERN pendant 15 ans, il n’est pas que grand scientifique. Il veut découvrir d’autres univers.

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Piero Zucchelli a troqué le robot scientifique qu’il a inventé pour un bateau et un tour du monde © Patricia Colmant | Nikon Z50

« La vie est une succession d’aventures. L’Atlantique, c’est une inconnue comme ce que l’on cherche des années dans nos microscopes. Il faut se lancer et là, je me lance dans la navigation. Avant je m’étais lancé dans le pilotage d’avion. » Sourire et cheveux bouclés, notre skipper-chercheur a quelque chose d’un chérubin de Raphaël. Il rayonne de joie sur le pont de son bateau, acheté à un Suisse qui pensait pouvoir naviguer sur le lac Léman avec un voilier fait pour la haute mer… Après Sainte-Lucie, Piero Zucchelli projette le tour du monde.

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Départ de Las Palmas © Patricia Colmant | Nikon Z50

 

Trois couples équipiers, une longue pause

Une ambition qui n’est pas à l’agenda de Time out et de ses trois couples équipiers. Pourtant ils se sont préparés depuis un an, comme pour un très long voyage. Pour cette première traversée, Marianne Caron, informaticienne comme ses camarades, a fait un stage d’infirmière. Les piqûres et l’essentiel de la pharmacie n’ont plus de secret pour elle. Tous font du bateaux et ont une vraie expérience de la navigation, mais ont suivi toutes les préparations recommandées par les organisateurs : météo, survie, sauvetage etc.… La liste est longue. « On n’est jamais trop prudent » relève en riant Yves-Marie Bay, seul vrai retraité de la bande et qui abandonne pour quelques semaines les études de doctorat en économie qu’il a repris à Nice. Un petit groupe de cadres qui avait besoin de changer d’air et qui considère l’expérience comme « une parenthèse de trois semaines dans la vie ».

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Les derniers préparatifs… © Patricia Colmant | Nikon Z50

Parmi tous ces partants vers l’aventure on conclura sur celle de Raphaël Ravassé, 24 ans, jeune agrégé de maths qui voulait profiter de son année de césure pour voyager en mer. Il met des annonces partout pour trouver un coéquiper -bourse des équipiers, magazines, ports… sans succès. Il décide alors de partir rouler avec son vélo acheté 50 € à son voisin. Le voilà en Suisse, puis en Autriche.

En septembre, il pédale vers la Slovénie quand il reçoit un message de Matthieu Leclercq, industriel du Nord, qui cherche un équipier pour faire le tour de l’Atlantique en famille. Rendez-vous est pris à Lille. Le charme du jeune matheux opère sur le père de famille qui souhaite emmener son fils de 14 ans dans cette circumnavigation. Mais l’école a ses exigences. Alors Raphaël est devenu non seulement équipier du catamaran Hakuna Matata, mais aussi le précepteur du collégien qui alimentera jusqu’en juin, un blog instructif pour ses copains de 3e qui passeront leur année en classe et… masqués.

P.M-C


Retrouvez tous nos articles consacrés à la voile dans notre rubrique sportive…

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