Portraits de chefs : la manière William Ledeuil,

Pionnier du végétal à Paris

Gastronomie

12MAI. 2022

newsletter

Gastronomie

Portraits de chefs : la manière William Ledeuil

Pionnier du végétal à Paris

12 MAI . 2022

Écrit par Adele Hugot

Photographies par Pierre Lucet Penato

Particulière, exigeante, singulière, la cuisine de William Ledeuil ne fait référence à aucune autre et s’inscrit pleinement dans le paysage gastronomique français : une cuisine française ouverte sur l’Asie et sur le monde mais également sur le végétal bien avant l’heure. Elle est, vingt ans après, toujours d’une extrême modernité. Discret, William Ledeuil a formé une nouvelle génération de chefs, dont Martin Maumet et Pandora Métayer, qui portent les couleurs d’une cuisine française en quête d’ailleurs… On les a rencontré à Paris, où ses 3 restaurants tournent à plein régime : The Kitchen Gallery, The Kitchen Gallery Bis (KGB) et le petit-dernier, Kitchen Ter(re).

william-ledeuil-les-hardis-1

William Ledeuil est l’un des pionniers du végétal…. Comme l’indique son livre éponyme, dont cette image est tirée.

 

William Ledeuil, une cuisine française ponctuée de touches asiatiques

Depuis vingt ans, la cuisine de William Ledeuil fait preuve d’une singularité et d’une étonnante modernité. Elle n’a pas vieilli, a su se renouveler sans perdre ses particularités et s’est transmise à une jeune génération de chefs talentueux. Quel est donc le secret du chef ?

les-hardis-william-ledeuil-1

William Ledeuil

A la seule lecture des intitulés des plats, on voyage dans le monde entier car si elle est profondément ancrée dans l’hexagone avec des beaux ingrédients de base, la cuisine de William Ledeuil est ponctuée de touches asiatiques qui viennent mettre en relief le produit sans jamais le dénaturer. Et en parlant de produits, ce sont les meilleurs qui sont sublimés par des rhizomes comme le galanga, le curcuma ou encore de l’huile de sésame qui, utilisés en condiment, viennent révéler le plat. Ces petites touches venues d’ailleurs sont la signature du chef, fidèle depuis des années à ses envies et sa conception particulière.

Jamais copiée, la cuisine de William Ledeuil se déguste d’abord avec les yeux, comme la palette d’un peinture dont certaines des couleurs seraient venues de pays lointains. Cette écriture inspirée est sans cesse enrichie par la recherche d’un petit je-ne-sais-quoi en plus.

 

The Kitchen Gallery, The Kitchen Gallery Bis et The Kitchen Ter(re), les trois restaurants de William Ledeuil

Cette cuisine, propre à William Ledeuil, était bien connue dans sa première adresse, The Kitchen Gallery, et se décline dans ses deux autres établissements, The Kitchen Gallery Bis et The Kitchen Ter, avec aux manettes des chefs jeunes et audacieux qui ont la font vivre fidèlement, chacun à leur manière. Ce sont ces deux dernières adresses que William Ledeuil nous demande de mettre en avant, privilégiant cette idée, toujours, de transmission qui lui est si chère.

« C’est comme si j’étais chez moi mais avec toujours une épaule bienveillante sur laquelle m’appuyer » – Martin Maumet

 

les-hardis-martin-maumet-3

Martin Maumet

Martin Maumet, chef mais également associé du KGB, réinterprète ce qu’il a appris au Kitchen Gallery  mais il laisse parler librement ses goûts et on retrouve dans ses plats ses produits favoris qui sont, par exemple, la harissa, la fleur d’oranger ou encore la rose. Lorsqu’on lui demande ce qui caractérise l’école Ledeuil il répond sans hésiter : l’assaisonnement ! « Les points forts de cette cuisine c’est une grande attention au sourcing des produits mais également un vrai travail sur le condiment qui accompagne les plats. Tout est dans l’équilibre, entre acidité et sucrosité. Une fois qu’on maîtrise cela, ça reste ancré ». Il admet reconnaître quand il déguste une assiette si le chef est passé par les cuisines du chef Ledeuil…

les-hardis-plats-dorade-16

Dorade marinée, radicchio et lime

Tel un musicien, « on apprend d’abord les gammes qui sont les cuissons, les assaisonnements et les bouillons et une fois maitrisés, on est libre de composer avec cela. » La cuisine est cadrée mais inventive et se nourrit des produits reçus au jour le jour. Martin s’adapte et joue avec les hors-d’œuvre qui sont chaque jour une véritable composition du moment. Dans ces petites œuvres comestibles, la créativité du chef s’exprime pleinement au gré de nouvelles saveurs et d’assaisonnements atypiques issus également de relations complices avec les producteurs tissées au fil des saisons et des années.

les-hardis-martin-maumet-4

La transmission chez William Ledeuil rime avec confiance, bienveillance et sérénité mais également le même amour des produits. Il le dit lui-même : « à chaque génération une flamme se transmet, la cuisine évolue et se modernise ! Elle ne doit pas être fixée dans le temps, chacun peut y mettre sa patte de s’exprimer librement. » Il donne aux chefs les clés, à eux de faire vivre cet esprit et de le renouveler. « Un plat doit être aussi beau que bon, avant que les papilles soient émoustillées il faut que l’œil soit séduit, attiré, nous explique-t-il encore. Quand la cuisine est de qualité, elle est naturellement source de bien-être. C’est un plaisir qui fait du bien. » 

les-hardis-plats-merlan-chou-17

Merlan, chou, navet, cresson, fenouil et haddock fumé

 

« On peut se régaler de bouillon sans évoquer sempiternellement le mot détox puisque, par essence, le bouillon est sain » – William Ledeuil

 

Pâtes et bouillons à Kitchen Ter(re)

les-hardis-pandora-metayer-25

Pandora Métayer ©Jean-Paul Fretillet

Pandora Métayer, chef du Kitchen Ter(re) s’inscrit également dans ce qui est considéré comme l’ADN du chef : la limpidité, la sapidité et la chatoyance. Saveurs d’ailleurs et terroirs d’ici prennent leur pleine mesure avec les bouillons délicatement ouvragés qui mettent en relief les pâtes de Roland Feuillas. Formée chez Kitchen Gallery, la jeune cheffe a ensuite rejoint le KGB avant de prendre, en 2020, la tête du Kitchen Ter(re). Maîtrisant les palettes de produits qui peuvent être associées en fonction des saisons, elle ponctue ses plats de pointes d’acidité qui ravivent et rafraîchissent les palais.

les-hardis-plats-bouillon-10

Bouillon d’oseille, asperges vertes, poireaux, anguille fumée ©Pierre Lucet Penato

William Ledeuil a vu en Pandora Métayer, au-delà de « son enthousiasme, son courage, sa rigueur et son envie de réussir » qu’elle avait voyagé, et « goûté d’autres cuisines. L’idée de la fusion des répertoires culinaires lui était familière. ». Sa formation lui a ouvert un champs des possibles infini. Elle s’explique. « C’est vraiment lui, quand j’ai été embauchée, qui m’a permis de forger mon identité de cuisinière. J’ai découvert des agrumes incroyables, des produits propres à sa cuisine, comme le galanga, la citronnelle, les feuilles de lime… J’y ai appris l’art des assaisonnements, des vinaigrettes, la science des condiments, et comment cuisiner avec des woks en respectant les produits.» 

Pour Pandora Métayer, l’esprit de la maison prime : « la matière première, c’est la garniture, toujours en fonction des saisons. Ensuite je réfléchis à la pâte et enfin au bouillon. J’aime jouer sur les textures des pâtes, aucune ne se ressemble : chacune appelle tel bouillon, tel condiment, parfois un beurre retravaillé, avec des algues par exemple, tel poisson ou telle viande. Je mets aussi l’accent sur les condiments, les jus acidulés, le croquant. » Sa définition du plat parfait ? Celui qui réunit « la maîtrise de cuisson et l’équilibre juste entre l’acidité et le gras. » En mouvement, la carte, renouvelée régulièrement, incarne, avec une nouvelle personnalité, la continuité d’une histoire démarrée il y a deux décennies… Une cuisine qui évolue sans perdre son essence, serait-ce là la vraie modernité? 

A.H


les-hardis-livre-le-vegetal-14

 

 

 

Et si vous aussi vous voulez vous glisser un instant dans la peau du chef et entrevoir la diversité de ses recettes végétales, allez jeter un œil à son livre, Végétal, qui propose des recettes accessibles sans pour autant dénaturer l’esprit du travail du chef.

Végétal de William Ledeuil aux éditions de La Martinière. 39,90 €

 

 

 

Kitchen Galerie Bis
25 rue des Grands Augustins
75006 Paris
Tel.01 46 33 00 85
Ouvert du mardi au samedi
Déjeuner : entrée, plat, dessert à 36 euros
Dîner – entrée, plat, dessert autour de 55 euros

 

KITCHEN TER (RE)
26, boulevard Saint-Germain, 75005 Paris
Tel.01 42 39 47 48
Déjeuner – entrée, plat, dessert à 30€
Dîner – entrée, plat, dessert autour de 47€
Ouvert du mardi au samedi, déjeuner et dîner.

Ajouter à mes favoris Supprimer de mes favoris
Un long week-end dans la Vallée de l’Ognon

Un long week-end dans la Vallée de l’Ognon

Ajouter à mes favoris Supprimer de mes favoris
La surréaliste histoire des Ateliers Hugo

La surréaliste histoire des Ateliers Hugo