Hôtel & Spa du Castellet,
Dire au revoir aux Bacquié

Hôtels & Chambres d'hôtes

05SEPT. 2022

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Hôtel & Spa du Castellet

Dire au revoir aux Bacquié

05 SEPTEMBRE . 2022

Écrit par Stéphane Méjanès

Alexandra et Christophe Bacquié, directrice et chef de l’Hôtel & Spa du Castellet, viennent d’annoncer leur départ pour la fin de l’année 2022. Une autre bonne raison d’aller profiter du cadre et de la table exceptionnelle de cet hôtel, joyau de Provence.

 

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Appelez-moi l’homme qui tombe à pic. Rien à voir avec le rôle non bionique de l’acteur américain Lee Majors (je vous parle d’un temps que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaître). Non, c’est plutôt qu’en ce jour de juin, notre arrivée à l’Hôtel & Spa du Castellet, 5 étoiles et membre de l’association Relais&Châteaux, se télescopait avec l’annonce officielle, la veille, du départ en fin d’année de ses deux figures emblématiques, Alexandra et Christophe Bacquié. Couple à la ville comme à la scène, l’une est (encore) directrice de l’établissement (et de son voisin le Grand Prix Hôtel), l’autre est (toujours) le chef exécutif de tous les points de restauration du site, dont le restaurant gastronomique triplement étoilé au Guide Michelin.

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« Forts de ce que nous avons appris ici et ailleurs, nous prenons un nouveau virage : la voie d’avancer. Courant 2023, nous aurons la joie de rallumer le moteur (et le piano) pour proposer à nos hôtes un lieu de vie à taille humaine, mêlant le sens du confort à la gastronomie. Pour nous, le luxe est dans les détails. Nous travaillerons donc à façonner un lieu unique, emprunt des valeurs qui nous rassemblent : la discrétion et la sincérité. »

 

Le communiqué de presse était à leur image, sobre et élégant, pour dire qu’ils ne seraient bientôt plus dans le Var mais quelque part en Provence. Sans en dire plus, même si, plus bavard que son épouse, le chef a vite lâché qu’on pourrait les retrouver, dans une très belle maison du Lubéron avec cinq chambres et largement de quoi cultiver son jardin. On aurait pu s’en retourner immédiatement, soudain confronté à la DLC de son futur article, programmé de fait pour être périmé en quelques mois. Mais, à l’image du lieu, luxueux mais sans ostentation, et des membres des équipes, rigoureux mais calmes, on n’allait certainement pas laisser ce pavé dans la mare du mondogastro gâcher les plaisirs qui se profilaient.

 

Plaisir partout

Posé au-dessus du village du Castellet, au bout d’une route en lacets où résonne de temps en temps le vrombissement illégal de quelques casse-cous sur deux roues, et une fois par an celui, autorisé, du Grand Prix de France de Formule 1, sur le circuit voisin, l’hôtel répond pleinement à l’expression parfois galvaudée de « havre de paix ». « Petit paradis », « écrin de verdure » ou « jardin d’Eden » fonctionnent aussi très bien, les clichés ne sont pas toujours lénifiants. Chic sans ostentation, architecture et coloris de mas provençal, pas un bâtiment ne dépasse un étage. Le regard est sans cesse orienté vers la Méditerranée au loin, la forêt de pins ou le tapis vert des greens du golf compact de 6 trous.

 

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Presque tout s’articule autour de la piscine, les chambres et les suites, le spa by Sim Biologic System et les Gabézos aux banquettes confortables comme sur pilotis. Rien ne manque pour que l’expérience soit parfaite, dans des parfums d’encens flottant dans les couloirs, juste un poil trop intrusifs pour nos narines délicates. On peut même profiter du cadre au Bistrot San Felice, et son parfait rapport qualité-prix-plaisir, par exemple en enchaînant vitello tonnato (25 €), saucisse de veau corse, purée, sauce moutarde (38 €) et fraise emmeringuée, crème légère, sorbet fraise (17 €).

 

 

Le bonheur d’être là est rehaussé par le talent d’un personnel formé à l’efficacité, la précision, l’anticipation, sans jamais s’incruster dans votre intimité. Le mérite en revient à Alexandra Bacquié, récompensée du prix de Manager de l’Année 2014 au Top Trophées de la Chambre de commerce et d’industrie du Var, Var Matin et l’Union patronale du Var, et nommée chevalier de l’ordre national du Mérite en 2016. « Lorsque l’on est arrivés en 2009, on s’est relevé les manches, on a foncé tête baissée, il y avait tellement de choses à faire », se souvient cette enfant de Suresnes, élevée en Touraine. « Avec Alexandra, on a tout fait, renchérit l’époux. L’hôtel était en grande difficulté, tout a changé, mais sans renier notre volonté d’être des aubergistes. » « On va continuer chez nous dans le même esprit, enchaîne t-il, déjà projeté vers demain. J’ai coché toutes les cases, l’un des Meilleurs ouvriers de France en 2004, 3 étoiles au Guide Michelin et Chef de l’Année du magazine Le Chef en 2018, 19/20 au Gault&Millau… Je n’ai pas peur de redescendre, quand on est champion olympique, c’est pour la vie. Mais, je viens d’avoir 50 ans, je ne veux pas partir deux ans trop tard, la vie mérite qu’on y mette un peu de piquant. On va quitter notre zone de confort mais un être humain doit toujours s’élever. La page sera tout aussi belle. »

 

Un chef d’oeuvre d’aïoli

En attendant, le quinqua amateur de vélo n’a perdu ni la ligne ni la vista. On se demande parfois ce qui différencie un restaurant lambda d’un restaurant étoilé, un deux étoiles d’un trois étoiles. Il faut s’attabler au Castellet pour comprendre. Un service de salle millimétré, souriant et compétent sur tous les sujets, un rythme soutenu, la technique qui s’efface et la poésie des mets. « Ce qui m’intéresse, c’est le goût, pas les assiettes tape-à-l’oeil, insiste Christophe Bacquié.

 

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Même à l’ère d’Instagram, je ne veux surtout pas un dressage démonstratif, parfois on « jette » les éléments dans l’assiette plutôt que de les ranger. » Cet art quasi brut culmine dans son « aïoli moderne », une palette de petits légumes des maraîchers locaux, fondants ou croquants, et de tronçons de poulpe d’une tendreté folle, à attraper avec une pince et à tremper dans une sauce aïoli (ail et huile d’olive) émulsionnée pour plus de légèreté mais pas moins de puissance. Donnez-moi le plat tout entier ! « Il m’a fallu une dizaine d’années pour le mettre au point, raconte Christophe de ce plat devenu signature. Il a fallu que je comprenne le terroir (il arrivait de Corse, ndlr) pour bien représenter la Provence avec quelque chose que les autres ne faisaient pas, comme la bouillabaisse que Gérald Passedat a mis à l’honneur.

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Le poulpe était peu présent à l’époque au restaurant. Sans perdre les marqueurs de l’aïoli, j’ai essayé de le rendre moderne, et jamais le même puisque les légumes changent en fonction de la saison. » Entrer dans la tête d’un chef de ce calibre permet aussi de mesurer la maîtrise et l’abnégation nécessaires. On pourrait décrire chaque plat, le thon à l’aloé vera, avec son incroyable charcuterie de ventrèche, le maquereau et son velours au lait d’amande, ou encore le pigeonneau au sang, cuit dans une pâte à sel épicée et servi avec un jus acidulé au vinaigre de myrte sauvage, clin d’oeil à la Corse natale du chef. Mais tout est simplement bon, n’est-ce pas là l’essentiel ? Surtout quand l’assiette est accompagnée de jolis flacons, pas moins de quatre sommeliers chapeautés par le jeune et malicieux Jonathan Pral, capable de trouver la cuvée qui vous va au teint, tel ce très accessible IGP Bouches-du-Rhône blanc 2013 de Minna Vineyard avec l’aïoli, ce divin jasnières Au pas de l’âne 2019 sur les poissons ou cet AOP Gattinara, vin rouge italien du Domaine Nervi, en accord parfait avec le pigeon.

 

 

Si l’envie vous prend d’aller voir briller les derniers feux du couple Bacquié au Castellet, notez deux rendez-vous. Un Dîner des Jeunes Chefs le jeudi 15 septembre, avec, entre autres, Coline Faulquier (Signature, Marseille), Ludovic Turac (Une Table au Sud, Marseille), Julien Caligo (Duende, Nîmes) et le pâtissier Thomas Moulin (Esterre by Alain Ducasse, Tokyo). Et, en point d’orgue, le mardi 18 octobre, Christophe Bacquié fête les 20 ans de sa première étoile, en compagnie de sa bande de potes pas banals : Frédéric Anton (Le Pré Catelan***, Paris), Arnaud Donckele (La Voile d’Or***, Saint-Tropez et Plénitude***, Paris), Gilles Goujon (L’Auberge du Vieux Puits***, Fontjoncouse), Arnaud Lallement (L’Assiette Champenoise***, Tinqueux), Emmanuel Renaut (Flocons de Sel***, Megève) et Sébastien Vauxion (Sarkara**, Courchevel). Un Dîner 20 étoiles, et beaucoup plus dans les yeux des mangeurs ce jour-là.

 

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