La fabuleuse saga de la montre Cartier Santos

On vous parle d’un temps où l’homme se déplaçait lentement, où voler restait l’apanage des créatures pourvues pour cet exercice par la nature… et où l’on dégainait sa montre de la  poche de son gilet. Un Paris tout neuf, doté de belles façades et de larges avenues rectilignes tout droit sortis de l’imagination du baron Haussmann se découvrait des frénésies d’innovation et d’expériences. A n’en pas douter, Alberto Santo Dumont, le fringant aviateur brésilien, incarne à la perfection l’esprit du temps : d’une élégance impeccable, son allure n’a d’égale que son ardeur à poursuivre son rêve : faire voler des objets plus lourds que l’air. 

© Cartier

Le nez en l’air, les Parisiens pouvaient suivre les péripéties de cet aventurier intrépide (il lui arrivera de terminer une expédition au sommet d’un marronnier aux alentours du Trocadéro), qui poursuivait son rêve en sillonnant le ciel de la capitale. On le verra ainsi se poser devant chez lui, 114 avenue des Champs-Elysées, aux commandes d’un aéronef joliment nommé  “la Baladeuse”. On imagine sans peine la stupéfaction des badauds et le panache de la scène ! En montgolfière, en dirigeable à moteur d’abord, puis en planeur ou en biplan de son invention (il en imaginera 22), ce merveilleux gentleman volant avait tout pour se lier d’amitié avec un autre héraut de la modernité et de l’innovation, Louis Cartier. Un pionnier lui aussi. Au tournant du siècle, les deux hommes ont l’âge où l’on rêve de changer le monde.

Imaginée en 1904, alors qu’Alberto Santos-Dumont vient de remporter une course en ballon du Parc de Saint-Cloud à la Tour Eiffel (30 minutes aller-retour, un exploit), le joaillier des têtes couronnées, connu pour son inventivité, s’avise que dans un tel contexte, les montres rondes portées au bout d’une chaîne viennent de basculer définitivement dans une époque révolue. Pour que l’aviateur puisse consulter rapidement sa montre en vol, une évidence s’impose : elle doit être portée au poignet. 

© Cartier

Deux ans plus tard, Santos-Dumont accomplit une prouesse que d’aucuns considèrent comme le premier vol homologué de l’histoire de l’aviation, aux commandes du “14 bis” un monoplan monomoteur imaginé par ses soins. Il porte alors une montre que l’on considère comme la première vraie montre-bracelet. La première montre moderne pour le premier des vols en avions, avouons que l’histoire est belle.

La montre qu’il porte ce jour-là  bouscule les codes horlogers en usage : outre son porter novateur, sa boîte pourvue de rivets apparents est fonctionnelle, simple, pratique et pourtant élégante, fidèle en tous points au cahier des charges de l’aviateur. S’affranchissant de la forme ronde des montres savonnette que l’on glissait de son gilet, elle est bien un symbole de la modernité en marche. Le monde vient d’entrer dans un XXe siècle encore plein de promesses : cette création unique va connaître un succès considérable dès le début de sa commercialisation, en 1911.

© Cartier Santos

La carrière de la Santos va connaître un nouvel élan en 1978, avec un bracelet en or et acier, des proportions plus généreuses en 1987 et un certain nombre d’évolution pratiques (un système de changement rapide du bracelet sans outil), des évolutions stylistiques (au niveau de la lunette et de la liaison entre la boîte et le bracelet en 2018), tout en conservant son ADN. En 2004, la Santos 100 célèbre le centième anniversaire de cette montre, qui se fait machine à remonter le temps en 2024, avec une très audacieuse Santos-Dumont Rewind, dont les aiguilles tournent… à l’envers. 

Cette collection (Santos avec un bracelet métal, Santos Dumont avec un bracelet en cuir), ne cesse de s’enrichir de pièces en édition limitées comme la récente Santos Dumont Edition limitée France pourvue d’un cadran en verre aventuriné commémorant l’épisode de la Baladeuse, ou de nouvelles versions XL en acier ou en métal précieux. 

Plus de 120 ans après sa création, la Santos de Cartier est bel et bien une icône.