Instant Grand Duc : le style du Lauréat

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05MAI. 2020

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Instant Grand Duc : le style du Lauréat

05 MAI . 2020

Écrit par Guillaume Cadot

7 nominations aux Oscars, une bande son et son titre “Mrs Robinson” passés à la postérité, la révélation d’un acteur anti-héros, une réalisation nouvelle vague dépeignant la libération sexuelle de la fin des années 1960 dans une Amérique puritaine, c’est un peu tout cela The Graduate. Mais c’est aussi le style vestimentaire de la côte Est adopté par le Tout Hollywood des sixties dont Dustin Hoffman est ici l’ambassadeur.

Par Guillaume Cadot

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L’histoire

De retour à Los Angeles, Benjamin Braddock, fraîchement diplômé, s’interroge sur son avenir professionnel et se morfond dans les tourments de l’amour alors qu’il est encore vierge. Lors d’une réception donnée par ses parents, il fait la connaissance de Madame Robinson, élégante femme mûre. Elle le séduit, il devient son amant mais s’attache rapidement à sa fille Elaine. Madame Robinson ne le supporte pas et fait tout pour l’éloigner de son amant. En vain.

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On aime

Le film démarre comme un rêve érotique d’adolescent sous la chaleur de l’été ; celui d’un premier de classe qui se dévergonde auprès d’une femme plus âgée dont la fille deviendra son premier amour… Sur les paroles et la musique de Paul Simon et Art Garfunkel, l’histoire prend immédiatement une autre dimension. Des images et une chanson qui deviennent la petite ritournelle pour toute une génération de pubères en pleine époque de libération sexuelle ; le plan dévoilant la jambe de Mrs Robinson (envoûtante Anne Bancroft) devant un Benjamin tétanisé en sera la référence !

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Mrs Robinson, elle, représente cette femme lasse de son mari qui ne lui donne plus que la richesse, réfugiée dans sa villa  à la décoration décadente, sur les hauteurs de Beverly Hills. Un univers avec juste ce qu’il faut de tape-à-l’oeil : la marque de la haute bourgeoisie de cette époque, souvent photographiée par Slim Aarons.

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C’est un triple succès : pour le film qui annonce l’avènement du Nouvel Hollywood, pour Mike Nichols qui décroche un Oscar et un Grammy pour sa réalisation et pour les deux chansons de Simon et Garfunkel, “The Sound of Silence” et “Mrs Robinson”, qui vont atteindre le top des ventes aux États-Unis. L’album “The Graduate”, composé essentiellement de chansons du duo dont “Mrs Robinson”, sort le 21 janvier 1968 et s’empare de la première place du Billboard 200.

L’élégance nonchalante qui se dégage de ce film est soutenue par les couleurs écrasées du soleil californien et les maisons ouvertes sur leurs piscines. Dustin Hoffman, héros anticonformiste, évolue dans ces paysages en ambassadeur de l’Ivy look adopté par le cinéma d’Hollywood.

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Entre 1955 et 1965, la génération des jeunes acteurs hollywoodiens s’est appropriée les vêtements de l’Ivy League, l’élite de la côte est américaine. Ils ont élevé ce style de bonne famille à la sauce californienne jouant sur le côté mauvais garçon de leur aura de stars naissantes. Clint Eastwood, Steve McQueen, Paul Newman, Anthony Perkins, Robert Redford, William Holden, Robert Wagner, entre autres, ont ainsi défini le code vestimentaire masculin typiquement américain pour toute une nouvelle génération.

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Patricia Zipprodt, la costume designer du film (elle a exercé toute sa carrière en tant que tel à la télévision, au théâtre, à l’opéra. Au cinéma, The Graduate est son plus grand succès) a parfaitement synthétisé l’Ivy look sur le dos de Dustin Hoffman en seulement 5 tenues.

Dans la scène d’introduction rythmée par “The Sound of Silence”, où Benjamin Braddock emprunte un tapis roulant à l’aéroport de Los Angeles, diplôme en poche, vêtu d’un costume gris en flanelle légère, d’une chemise à col boutonné en Oxford blanc, d’une cravate club à rayures bleues et dorées et d’une paire de souliers lacés noirs, il incarne l’homme de la côte Est, le businessman de Manhattan, celui qui veut en être, habillé comme son semblable, le “Man in the Gray Flannel Suit”. Une image actualisée depuis par la marque Thome Browne et ses costumes gris aux proportions atypiques reprenant cette apparence de l’homme puissant en costume.

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Braddock adopte ensuite l’Ivy look à sa villégiature californienne. Plus décontracté, Dustin Hoffman endosse le look cravate-tricot et veste de sport (motif herringbone gris ou seersucker rayé bleu et blanc) avec la chemise col boutonnée “Brooks Brothers”.

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La veste corduroy moutarde associée à un polo marine et un jean signe l’Ivy look version Hollywood, rigueur des pièces classiques de l’Ivy League et décontraction de l’association moderne de la veste et du polo.

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Le film se termine avec l’inimitable tenue de bord de mer par temps gris, typique de la côte Est pour traîner dans les Hamptons un jour de pluie : un Chino classique un peu court, des Converse Jack Purcell usées aux pieds et une parka mastic à capuche type “nautical jacket” pour tirer des bords sur son vieux gréement !

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On retient quoi ?

Gloire aux Mrs Robinson ! Cette chanson était un projet personnel de Paul Simon. Elle parlait de la relation entre Madame Roosevelt et Joe Di Maggio, le grand joueur de baseball, symbole de l’Amérique mâle et dominante. L’auteur avait un contrat avec le producteur du film pour 3 chansons. Il ne voulait pas écrire la bande son du film car il était en tournée. Nichols lui dit alors cette phrase devenue culte  : “Eh bien maintenant, c’est à propos de Mrs. Robinson, plus de Mrs. Roosevelt!”.

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Ce morceau sublime a fait l’objet de nombreuses reprises. Frank Sinatra change un couplet pour rendre hommage à l’héroïne du film à la mauvaise réputation, dans son album My Way (1969). Les Lemonheads signent une version agitée dans Le Loup de Wall Street, Billy Paul la fait swinguer et le James Taylor Quartet la transforme en funk. Cette chanson a aussi été glissée comme une référence historique, un clin d’œil générationnel dans beaucoup de films comme Wayne’s world 2, Forrest Gump ou American Pie.

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Improviser un bar d’été comme chez Mrs Robinson. On chine un vieux bar en rotin, on colle deux tabourets seventies devant, quelques apéritifs essentiels des soirées d’été pour jongler entre Américano, Martini et Lillet tonic. Une belle manière mesdames de ressortir votre fume cigarette et vous glisser dans une robe de soie fluide le tout sans chaussures. Messieurs, votre vieux blazer fera l’affaire avec un cinq poches blanc.

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Courte, durable et intemporelle, la garde-robe de Benjamin Braddock pour la rentrée. Le revenge shopping pointe son nez après ce confinement qui nous a mis au régime vestimentaire. Il va falloir reprendre des mesures au propre comme au figuré. Prenez modèle sur ce Graduate à la garde-robe mince. Achetez utile et gardez vos vêtements longtemps : un blazer marine, un costume droit gris en flanelle légère, deux chemises button down blanc et bleu, deux cravates (une tricot unie marine ou noir et une à rayures club en soie), une paire de mocassins, une paire de souliers noir, un chino, un jean, une veste en corduroy, une autre en tweed léger, une parka, une paire de sneakers en toile. Et vous devriez tenir longtemps.

G.C

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On lit.
Hollywood and the Ivy Look aux éditions Reel Art Press. Si le style Ivy sauce hollywoodienne vous parle, On y trouve de superbes photos des acteurs de cinéma des années 1960, mais aussi les feuilletons télévisés, les chanteurs, réalisateurs, etc. Une petite bible du style américain si contemporain.
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