La vie en vert, cuisiner les blettes comme un Niçois

Cuisine

29JUIN. 2020

newsletter

Cuisine

La vie en vert, cuisiner les blettes comme un Niçois

29 JUIN . 2020

Écrit par Morgan Malka

Photographies par Esther Ghezzo

C’est un fait, les Niçois sont passés maîtres dans l’art d’accommoder les blettes. Leur cuisine est d’une saisissante modernité faisant la part belle aux légumes de saison. Végétale, inventive et bon marché jusque dans la pâtisserie, découverte des plaisirs de table nissards en 10 recettes !

Par Morgan Malka | Photographies © Esther Ghezzo sauf mention contraire (D.R)

blettes-2

Les barbajuans, à découvrir plus bas…

Juché entre terre et montagne, entre Provence et Ligurie, le pays Niçois s’est forgé une identité culinaire bien particulière : le bétail y est difficile à élever et la culture intensive impossible. En résultent de nombreuses préparations à base de poissons, petits gibiers et surtout profusion de légumes cultivés en ort et en caïroun, respectivement des jardins irrigables à l’extérieur des villages et ceux jouxtant les maisons.

Les protéines d’origine animale sont souvent reléguées au second plan et bien avant les fleurs de courgettes et autres courges longues règne la blette, une herbe potagère appréciée localement au point qu’elle figure presque dans toutes les recettes du comté.

nice

Le cours Saleya à Nice, jour de marché, D.R

Les Niçois ne sont pas surnommés caga-bléa par leurs voisins sans raison, inutile de traduire !

Ailleurs, la blette est souvent dédaignée. Elle est pourtant consommée en Europe depuis l’époque des Celtes et des Romains comme en attestent des recherches archéologiques la présentant sur nos tables déjà 2000 ans avant Jésus-Christ. Autrefois appelée poirée c’est au pays de la Roya entre Breil et Tende qu’elle s’est le mieux implantée.

1. La truchia, une omelette de voyage

La truchia, trouchia ou crespeou est une omelette de voyage. Bien meilleure froide que sortant de la poêle, elle se prépare volontiers d’avance et fait invariablement partie des pique-nique. Pour la préparer il suffit de battre des oeufs en omelette, d’y ajouter le vert des blettes et quelques feuilles d’épinards émincés, persil, cerfeuil, sel, poivre et parmesan.

blettes-3

La Truchia, D.R

L’omelette ainsi mélangée est mise à cuire dans de l’huile d’olive de la région. Une fois prise, la cuisson se poursuit dans un four chaud pendant une vingtaine de minutes. La truchia doit être retournée à mi-cuisson. Servie froide elle est généralement enrichie d’un filet de vinaigre de vin.

 

2. La torta pasqualina, une tourte aux blettes

La torta pasqualina est préparée à Pâques pour célébrer la résurrection du Christ, cette tourte est composée d’une pâte à base d’huile d’olive et farcie de blettes, épinards, petits pois, artichauts, fèves, oeufs de caille.

blette-4

La torta pasqualina, D.R

La cuisson à l’étouffée donne un résultat extrêmement savoureux qui peut être enrichi de parmesan et d’aromates.

 

3. Les célèbres ravioli à la niçoise

Voici un monument de la cuisine locale ! C’est la célèbre daube de boeuf qui est utilisée pour la farce de ces petites pâtes, une daube souvent parfumée de zestes d’orange (nous ne sommes pas loin de Menton où abondent les agrumes).

ravioli-nicois-vintage

Les raviolis niçois photographiée pour un ELLE vintage… D.R

Une fois cuite elle est finement hachée, on la complète avec des blettes et de la cervelle de veau. Ainsi farcis les raviolis sont cuits à l’eau, arrosés de jus de cuisson de la daube et recouverts de parmesan.

 

4. Les pelotons, boulettes de blettes

Les pelotons sont les cousins des gnudi toscans. Ils se composent de blettes hachées auxquelles on ajoute des oeufs, du fromage et des herbes aromatiques.

pelotons-blette

D.R

Il suffit de former de petites boulettes, de les rouler dans la farine et de les faire cuire dans l’eau bouillante. Une fois remontés à la surface ils se servent avec une sauce tomate ou un reste de daube.

 

5. La poche de veau farcie aux légumes niçois

La poche de veau est de toutes les célébrations. Il s’agit ni plus ni moins d’une poitrine de veau ouverte en portefeuille dans laquelle sont glissés tous les légumes verts hachés qu’on peut trouver sur le Cours Saleya. Les blettes y figurent en bonne place en plus des courgettes violons. La poche est parfumée de marjolaine, de basilic, on y ajoute même des fleurs hachées.

poche-veau-renards-gourmets

Une fois farcie, la poitrine de veau est recousue, cuite lentement dans un bouillon aromatique puis séchée et passée au four quelques instants. Elle se déguste plutôt tiède ou froide une fois coupée en tranches. C’est un rôti de roi.

 

6. Les merda de can, drôles de gnocchi et drôle de nom

Les merda de can, oui vous avez bien lu. Cette recette fait hurler de rire les Italiens qui viennent en vacances sur la Riviera ! Merda de can signifie littéralement merde de chien. C’est vrai que la forme de cette spécialité peut laisser libre court à l’imagination…

merda-de-can

D.R

Il s’agit néanmoins de gnocchis de pommes de terre auxquels sont ajoutées des blettes. Eux aussi se servent dans une sauce tomate ou avec la daube. 

 

7. La porchetta aux blettes

Héritée d’Italie, la version niçoise est également préparée avec de la poitrine de porc ou un cochon de lait entier, cependant il n’est pas rare d’en trouver à base de lapin entièrement désossé.

porchetta-renards-gourmets

On ne change pas une équipe qui gagne, la farce contrairement à sa cousine italienne se compose… de blettes, poitrine fumée, parmesan et autres légumes verts. Coupée en tranches fines elle se sert souvent en sandwich.

 

8. La torta de blea, la blette version sucrée

Place aux douceurs, pour ceux qui n’auraient pas eu leur compte de blettes, ne vous affolez pas, il en reste pour le dessert !

torta di blea nissarda - Renards Gourmets

La tourte aux blettes est la pâtisserie la plus emblématique du vieux Nice, au programme : une pâte sablée garnie de blettes, d’amandes, de pommes, de liqueur, de poivre et de parmesan. Un accord étonnant et pourtant la blette bien que discrète apporte un goût incroyable, à essayer de toute urgence !

 

9. Le sou-fassum, un chou farci aux blettes

La blettomania ne s’arrête pas à la ville de Nice, puisque tout à côté, à Grasse, ville des parfumeurs, on prépare le sou-fassum, un chou farci, de quoi ? De blettes !

chou farci - Renards Gourmets

La recette est tellement appréciée qu’on raconte que si les tables des maisons comportent un tiroir c’est pour cacher son sou-fassum. Et quand quelqu’un arrive à l’improviste, on lui lance : « Dommage que tu ne sois pas arrivé plus tôt, nous aurions partagé le fassum », le fassum étant à l’origine le nom du filet à provision permettant de donner sa forme au chou.

 

10. Les barbajuans, ravioli aux blettes frits

Les barbajuans sont originaires de Menton mais se dégustent aussi bien à Monaco qu’à Nice. Il s’agit de raviolis farcis de blettes et de ricotta mais qui ne sont pas cuits dans l’eau, ils sont frits !

ravioli-blettes-renards-gourmets

Croustillants et extrêmement addictifs, c’est l’apéritif parfait sur la Riviera, à déguster avec une anisette… On s’y voit déjà, n’est-ce pas ?

M.M

L’astuce : Si vous ne savez pas quoi faire des cardes blanches et filandreuses, faites comme les Niçois, préférez les variétés qui n’en ont pas ou presque.
Ajouter à mes favoris Supprimer de mes favoris
Portrait : Pierre-Alain Challier, un gentilhomme au XXIe siècle

Portrait : Pierre-Alain Challier, un gentilhomme au XXIe siècle

Ajouter à mes favoris Supprimer de mes favoris
Enquête : le rosé peut-il jouer dans la cour des grands ?

Enquête : le rosé peut-il jouer dans la cour des grands ?