Intérieurs : François Catroux,

Roi du style seventies

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20NOV. 2020

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Intérieurs : François Catroux

Roi du style seventies

20 NOVEMBRE . 2020

Écrit par Pauline Da Costa Sampieri

S’il est bien un lieu au centre de tous les intérêts, en cette période de confinement, c’est l’intérieur. L’intérieur qui révèle les goûts et les humeurs, plus encore, la personnalité de ses propriétaires… De ce constat, on a voulu tirer une série d’inspirations dans l’histoire de la décoration. Le célèbre décorateur François Catroux s’est éteint la semaine dernière à l’âge de 84 ans. Il formait avec Betty Catroux, muse gémellaire d’Yves Saint Laurent, l’un des couples les plus en vue des années 1970. Plus discret que son épouse, François Catroux n’en reste pas moins l’un des initiateurs du fastueux style seventies. Retour sur deux réalisations d’exception.

Les origines : un oeil et des rencontres

François Catroux, d’origine parisienne, grandit en Algérie. A la faveur d’un voyage à New York, il débute sa carrière comme journaliste pour Hélène Lazareff, grande prêtresse du magazine ELLE.

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Betty et François Catroux à leur mariage, en 1967, DR

Pas d’études spécialisées pour François Catroux mais un oeil. Et quel oeil ! Il y a aussi des rencontres, déterminantes. Notamment avec Philip Johnson, le célèbre architecte de la Glass House en 1949 et représentant du style International. Cette référence, François Catroux la citait volontiers.  De même que celle de Charles Sevigny, fameux décorateur à l’origine de l’expansion de l’éditeur Knoll en France qui partage avec Catroux ce savant goût des mélanges.

L’appartement des Catroux comme terrain d’expérimentation

C’est le premier, le terrain de jeux, la genèse : l’appartement de François Catroux en 1967, celui qu’il partageait avec Betty. Iconique, photographié sous toutes ses coutures, cet intérieur était à l’image du couple, résolument moderne.

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Les Catroux chez eux, en 1970. A droite, photographiés par Horst P. Horst © Getty Images. A gauche, D.R

Un dépouillement assumé, un concentré des seventies avec des matériaux contemporains tels que l’aluminium chromé, le skaï, le plexiglass… Cet appartement fut sa meilleure carte de visite. 

 

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Betty Catroux chez elle à Paris, en 1970 par Horst P. Horst © Getty Images

 

 

La reconnaissance avec le showroom de Mila Schön à Milan 

Puis vint le grand lancement, celui qui l’a fait connaître internationalement et qui lui offre une renommée pour les décennies à venir : le showroom de Mila Schön à Milan. L’aménagement de la boutique fera la couverture du magazine L’Oeil alors à la pointe de la création contemporaine.

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La boutique pensée par François Catroux pour Mila Schön, à Milan. D.R

Cette créatrice haute couture – qui habilla entre autres Marella Agnelli et Lee Radziwill pour le bal Noir et Blanc de Truman Capote – est à la pointe de la mode de son temps. Il lui fallait bien un décor à la hauteur de ses ambitions. Dans un article de Vogue en 1968, le journaliste enthousiaste résume à merveille l’univers Schön – Catroux, s’exprimant à propos de la boutique : « c’est probablement la plus luxueuse, la mieux aménagée, la plus moderne boutique en tout lieu… Tout est de qualité à l’instar d’un manteau, d’une veste ou d’un tailleur de Mila Schön. »

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D.R

Dans les salons, des présentoirs cylindriques en formica blanc rétro-éclairés ponctuent l’espace. Les murs sont recouverts de formica et d’aluminium anodisé or. Le salon de présentation des collections est conçu comme un petit amphithéâtre antique : sol et gradins sont tapissés de moquette beige tandis que les piliers sont recouverts de miroirs. A l’intérieur du plafond circulaire un module abrite un système de climatisation, de sono et de lumière. Le luxe oui, mais le confort aussi !

Là, François Catroux pose les jalons de son style : élégant, ne manquant pas de créativité. Il entre dans la légende. Son goût ne cessera de s’affirmer par la suite. Après des débuts très seventies, il délaisse peu à peu les matériaux nouveaux, ou du moins les mélange à des matières naturelles telles que le bois, le lin, le coton. Sa palette graphique s’atténue au profit de couleurs douces : blanc, écru, beige.

 

 

Le Chalet de Ferrières pour les Rothschild

C’est en amateur éclairé et agenceur érudit que le couple Guy et Marie-Hélène de Rothschild fait appel à François Catroux pour le Chalet de Ferrières.

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Au chalet de Ferrières, François Catroux conserve mais modernise le fameux « goût Rothschild ». D.R

Empreint d’un certain classicisme ou du moins respectueux de la tradition, François Catroux se plaît à mélanger oeuvres d’art, objets anciens et pièces contemporaines. Les objets d’antiquité côtoient les oeuvres de Guy de Rougemont ou encore du couple Lalanne.

L’aménagement de ce lieu marque la fin des bals somptueux donnés au Château de Ferrières. Le Baron Guy de Rothschild et sa femme conçoivent avec François Catroux un chalet intimiste et sophistiqué. Le style Rothschild est déjà affirmé, Catroux y distille une touche contemporaine.

Le Jardin d’hiver est un merveilleux exemple de cette collaboration. Le plafond en teck répond au couleur des murs tendus de cuir de Russie, des trésors du XVIIe siècle font écho aux Moutons de laine de François-Xavier Lalanne et un confortable salon victorien complète cet agencement d’un autre temps. Tout est merveille. Marie-Hélène de Rothschild ira même jusqu’à réintégrer des boiseries du Château de Sanssouci pour orner la salle à manger. L’éclectisme poussé à son paroxysme.

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Chez les Santo Domingo, à Paris. D.R

Durant toute sa carrière François Catroux a oeuvré pour des commanditaires-collectionneurs. Ils ont confié à Catroux la création de leur écrin. Outre Guy et Marie-Hélène de Rothschild, citons Gardner Cowles Jr, Barry Diller, Diane Van Furstenberg, les Van Zuylen, la famille Santo Domingo. François Catroux a su tout au long de sa carrière se renouveler, en restant en prise avec son temps, sans délaisser ses premières amours et ses références seventies.

P.D.C.S

On lit : François Catroux, par David Netto, préface Diane von Furstenberg, aux éditions Rizzoli, env. 40 €

Vous aimez notre série « Intérieurs » ? Relisez notre premier article consacré aux intérieurs de Madeleine Castaing

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