Au restaurant en Auvergne : Adrien Descouls raconte ses Origines

Gastronomie

30AOÛT. 2022

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Au restaurant en Auvergne : Adrien Descouls raconte ses Origines

30 AOûT . 2022

Écrit par Valentine Sled

Photographies par Clément Vayssières

Chef de son restaurant étoilé Origines, perché au sommet de la colline du Broc, le chef Adrien Descouls y propose une gastronomie profondément ancrée dans son terroir auvergnat. Au détour d’un séjour dans la région, nous sommes passés par cet établissement mystérieux, architecture moderne dans un écrin de pierre médiévale, pour goûter sa cuisine et discuter de sa vie. Rencontre.

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Une enfance protégée 

Il évoque son « enfance protégée » avec des yeux pétillants. Elle est loin, l’époque où Adrien Descouls se délectait des petits plats de Mémé. La simple croustade, engloutie en 5 minutes, demandait pourtant 5 heures de préparation. Cette cuisine rustique, simple d’apparence, suscite cette émotion qui reste aujourd’hui sa plus grande source d’inspiration.

Dans la région des Combrailles, à la frontière du parc des volcans d’Auvergne, Adrien grandit dans le petit village de Gelles. Sa mère, proviseur de lycée et son père, huissier de justice, lui transmettent cette sensibilité pour les bons produits, si chère à leurs yeux. Naturellement, Adrien découvre très jeune ce bon sens paysan, partageant son temps entre cueillette en montagne, chasse en forêt et visites à la ferme, surveillé de loin par la boulangère du village.

 

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« J’étais du genre à cacher du saucisson dans ma table de nuit plutôt qu’une Game boy ». En grand gourmand, il comprend rapidement que la table est un lieu de rassemblement, « où se produit cette chose curieuse qui lie l’estomac au champ du psyché ». Petit, il assistait aux débats politiques virulents et aux dissidences familiales. Mais quand « la popotte » arrivait sur la table, une ambiance sacrée s’installait. « Les visages se déliaient pour laisser place à de grands sourires ». Un constat décisif pour le reste de sa vie… à quelques détails près.

 

En cuisine à 14 ans

« Pour être tout à fait franc, c’est un échec scolaire qui m’a mené aux cuisines ». À 14 ans, ses parents le font travailler dans une maison étoilée de la région. Peu convaincu au départ, Adrien y trouve en fait sa vocation. Après un tour par Vienne, puis par Lyon, il atterrit à Paris, d’abord au Ritz puis au Georges V aux côtés d’Eric Briffard. « Pour lui, le mot transmission n’est pas galvaudé ». Très sensible à son histoire de fils d’agriculteur et à sa philosophie, Adrien en fera son modèle d’inspiration. Lui, le grand chef qui osait déjà dans les années 2000 servir une simple poule au pot dans un restaurant 3 étoiles, « chose complètement disruptive avec l’époque ». 

 

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Après plusieurs années à Paris, et un passage dans Top Chef où il termine demi-finaliste, décision est prise par Adrien et sa compagne Émilie de retourner sur les terres d’origines, à la naissance de leur fille, en 2017. Et justement, « radio cassolette », alias l’ancien maître d’apprentissage d’Adrien, les met au courant d’une affaire à reprendre en Auvergne.

 

Un restaurant en Auvergne : les débuts d’Origines

Le challenge est de taille, car tout est à (re)faire : il faut reconstruire une clientèle, réaménager l’établissement, trouver des collaborateurs de confiance, revoir le système économique… « J’ai repris une coquille vide ». L’objectif était de créer un établissement qui ne polluait pas mon propre environnement de travail ». Le jeune chef met en place un système de chauffage 100% électrique en préférant le plancher chauffant aux radiateurs, installe des grandes baies vitrées pour favoriser le rayonnement naturel du soleil, avec des capteurs qui permettent d’adapter la luminosité de la pièce.

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En cuisine est instauré un travail consciencieux qui tend vers le zéro déchet, avec un compost pour les matières organiques et le recyclage des capsules de café et du textile usagé. La démarche écoresponsable se ressent jusque dans les produits mis à disposition dans les six chambres de l’hôtel : du savon et du shampooing solides, fabriqués avec les plantes locales. 

 

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Le choix d’une décoration épurée et contemporaine oscillant du beige au blanc couronne le tout, mettant en avant la nature environnante à coups de grands pans de vitres, et crée chez les visiteurs un surprenant sentiment de sérénité. Dans la salle du restaurant, la silhouette des branches d’un arbre structure les murs de la pièce, encadrant cette immense baie vitrée qui offre une vue imprenable sur la vallée.

Adrien Descouls, la cuisine du terroir auvergnat

La première année, Adrien Descouls propose une gastronomie française classique, attendue par sa clientèle. Mais l’envie de travailler des produits locaux s’impose comme une évidence. Créer une cuisine qui a du sens, représentative de la tradition nourricière de l’Auvergne. Il décide de fermer le midi et se met à arpenter le département deux fois par semaine, avec son camion, pour dénicher les meilleurs producteurs de la région. 

 

 

« Ma grand-mère avait un don pour faire de plats très simples des choses merveilleuses ». La difficulté est de trouver l’équilibre entre cette émotion et la régularité imposée par les maisons étoilées. La stratégie en cuisine, revue intégralement, peine à convaincre la clientèle au premier abord. En janvier 2020, le restaurant est à deux doigts de déposer le bilan. Un mois plus tard, il décroche sa première étoile au Michelin, récompense ultime, après quatre mois de doutes et de remises en question. 

 

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Résumons : dans l’assiette d’Adrien Descouls, des produits modestes, symboliques du terroir auvergnat, sublimés par les techniques de la cuisine bourgeoise, apprises aux côtés de ses mentors. Sa source d’inspiration ? Le paysage, face à la salle du restaurant. Le poisson de mer est volontairement banni, les légumineuses du Puy-de-Dôme sont mises à l’honneur, la farine du moulin de Perthus aussi, ou encore l’huile de noix Blot, servie au début du repas…

 

 

 

Le chef décrit son menu comme une randonnée en montagne : « on monte crescendo avec des saveurs de plus en plus percutantes, pour redescendre en douceur vers les plaines ». On se rappelle de cette asperge en différentes textures et températures, caillé de lait et notes de verveine et citronnelle et de son plat-signature autour de la lentille verte du Puy, comme une salade (pas si simple), avec un jus de veau et de lard, gel de cerfeuil, frites de pain de seigle et caviar Sturia. Cette promenade est accompagnée des choix judicieux du sommelier Vincent, qui à seulement 25 ans, fait preuve d’une grande audace dans ses accords.

 

 

Ils ont cet engouement commun pour la verveine, on ne peut plus emblématique du département et très présente dans la cuisine d’Adrien – « c’est même le fil conducteur du menu », avec ce beurre aromatisé qui accompagne tout le repas.

 

Origines est à ce jour le seul bar à proposer un chariot de digestifs qui présente 18 références de liqueurs de verveine artisanales, avec pour projet d’en doubler le nombre d’ici peu !

 

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Objectif : une deuxième étoile ?

Malgré la localisation autarcienne d’Origines, la maison draine une clientèle du coin et de plus loin, qui repart (quasi) toujours conquise. L’objectif en ligne de mire ? La deuxième étoile, depuis le moment où ils se sont installés. « Une grande maison est unique par ce qu’elle propose et ce qu’elle crée, il faut qu’elle soit identifiée par rapport à son territoire et qu’on ne puisse la trouver nulle part ailleurs ». À priori, Origines a déjà toutes les cartes en main pour la décrocher un jour, avec ce petit supplément de détermination, si caractéristique d’Adrien Descouls.  

 

V.S

 

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